Rias Baixas Albariño : attention, danger !

 Vous vous souvenez de ce post que j’ai commis en février 2012 sur ma découverte émerveillée des vins de Galice, et en particulier du Rias Baixas Albariño ? J’écrivais que j’y retournerais. Eh bien, c’est fait ! Cet été, nous sommes allés passer la première semaine d’août à Cambados pour la fête de l’albariño.

-         Alors, alors, raconte ! L’albariño, c’est toujours aussi bien ?

-         Eh bien je vais vous décevoir : non, c’est beaucoup moins bien que dans mon souvenir !

 En 2010, quand j’ai découvert ce vin, j’y ai trouvé de la richesse, de l’authenticité, beaucoup de caractère et des prix sages. Cette année, j’ai rencontré des vins dilués, de petite facture, uniformisés et vendus à des tarifs à faire rougir un maquignon. Ce n’est pourtant pas faute de persévérance : autant la fête de l’albariño n’est qu’un immense parc forain peu propice aux dégustations analytiques, autant l’organisation pro est bien faite et permet de déguster dans de bonnes conditions la quasi-totalité des producteurs (plus de 130 échantillons présentés). J’y ai passé le temps qu’il fallait, et j’ai peiné à retrouver mes sensations initiales.

Que s’est-il passé ? Mon enquête sur place n’a rien donné eu égard à ma faiblesse en Castillan et en Galicien. Mais de retour en France, j’ai posé quelques questions qui m’ont mis sur une piste : il semblerait que depuis quelques années, une grande offensive de l’appellation Rias Baixas se développe en Europe, et particulièrement en direction des buveurs de blanc allemands, avec pour n’en pas douter l’objectif de vendre à l’export une production qui jusque là n’était consommée que localement. Le corolaire, c’est d’une part qu’il faut produire, et d’autre part qu’il faut rémunérer la filière. D’où la qualité en baisse et les prix à la hausse. J’étais parti là-bas en voiture pour rapporter quantité de bouteilles pour mes amis, et au final, je suis revenu avec deux caisses que j’ai eu bien du mal à sélectionner…

Je crains qu’il ne se passe pour ce vin ce qui est arrivé aux beaujolais au milieu des années soixante-dix : une demande tirée par le marketing au mépris des fondamentaux du produit. Souhaitons qu’il n’arrive pas aux viticulteurs de Galice ce qui est arrivé aux nôtres dans le  Beaujolais dix ans plus tard !

 

Les vins de Galice

Eté 2010 : une lubie me prend, aller faire un tour en Galice et visiter Saint Jacques de Compostelle. Un ami d’origine espagnole m’avait vanté les mérites de cette province située juste après le León, sa région d’origine, celle-là totalement dénuée d’intérêt d’après lui. Mais la Galice, là, alors… Et nous voila débarquant en début de soirée à La Corogne, riante cité maritime et capitale industrielle du secteur, juste à temps pour aller dîner. Aucune difficulté à trouver un restaurant vu la densité et la diversité des établissements en concurrence, nous jetâmes notre dévolu sur une petite salle déserte en ce début de soirée – les espagnols dînent tard – mais d’apparence bien cosy. Poulpe et produits de la mer se disputant le menu, le choix se révéla facile malgré un castillan indigent et aucune idée du galicien, la langue locale. Mais il nous fallait un vin blanc. Incapable de détailler, je me contentai de demander du « vino blanco » local, force gestes m’assistant dans l’explication de ce dernier qualificatif. Une bouteille arriva, plutôt engageante dans son ruissellement de condensation, proclamant fièrement son pedigree « Rias Baixas Albariño ». Inconnu au bataillon.
Je nous sers, hume le verre, goûte : le choc ! Un bijou ! Une merveille, un trésor, une pépite ! Le contraire de ce que l’imaginaire populaire, dont je ne suis pas la dernière victime,  véhicule comme image du vin espagnol. D’abord, du blanc, pas vraiment la couleur qu’on attend dans un pays que l’on imagine écrasé de soleil, et surtout une finesse, une délicatesse, un racé ! Rarement ai-je connu le coup de foudre comme ce soir-là pour une découverte aussi inattendue. Naturellement, le lendemain, j’ai voulu vérifier, et là, paf !  Rebelotte ! Un autre albariño, une autre émotion, un nouveau ravissement, et une confirmation : ce vin est une sacrée trouvaille.
La meilleure description que j’ai pu imaginer est une sorte d’intermédiaire entre les Rieslings Grands Crus d’Alsace et le Condrieu : délicatement aromatique, complexe et floral sans être ni lourd ni acide. Beaucoup de délicatesse, et pas trop de degrés : quasiment l’idéal pour traiter la soif. D’ailleurs, les Galiciens ne s’y trompent pas et l’albariño reste le raisin-roi des carafes et flacons servis en terrasse des bistrots. Ah oui, il faut que je précise, il s’agit d’un cépage, d’une variété de raisin locale qui réussit particulièrement bien sur ces terrains primaires au climat frais et venté.
Bien entendu, j’ai continué mon enquête, et spécialement à St Jacques où, tourisme aidant, on trouve quantité d’établissements intermédiaires entre le caviste et le bar à vin pour parfaire ses connaissances. Vous n’imaginez pas la diversité des vins de Galice ! Je pourrais vous en écrire des pages, mais fidèle à ma ligne, je vais plutôt vous recommander d’y aller, car il existe début août un événement à ne pas manquer : la semaine de l’albariño à Cambados, petite ville côtière située à une centaine de km au sud de St Jacques. Outre la fiesta permanente à l’espagnole et quantité de spectacles présentés cette semaine-là pour vous distraire, on peut déguster la quasi-totalité des producteurs de l’appellation et faire son marché dans des conditions idéales. Soyez-en sûrs : en 2012, j’y serai !
Ci-dessous une petite présentation que j’avais préparée pour mes amis :