Le Gard m’a tout l’air d’un département à découvrir. L’autre jour, je musardais à Saint Ambroix, riant village à cheval sur la Cèze, lorsque je fis une trouvaille. Mais laissez-moi vous dire deux mots sur la Cèze, avant de parler de vin. Ce qui a sans doute un rapport, d’ailleurs. Cette région du piémont des Cévennes, drainée par la rivière Cèze, se trouve soumise au phénomène des « épisodes cévenols », c’est-à-dire des pluies torrentielles provoquées par la rencontre de masses d’air très humides remontant de la mer et des montagnes cévenoles qui déclenchent leur condensation. Une toise a été fixée sur l’angle d’une solide bâtisse située à proximité de la rivière : on y a inscrit une crue de ONZE mètres survenue au début du XX° siècle – en 1906 si mes souvenirs sont exacts. Depuis, le barrage du Sénéchas mis en eau en 1976 a permis de réduire ces extrêmes, mais les crues de 4 ou 5 mètres ne sont pas rares.
Autant vous dire qu’en 1906, il devait y avoir près de quatre mètres d’eau dans le temple sis à une portée d’arbalète et reconverti depuis en caveau de dégustation-vente. Une construction étonnante, sans doute ancienne à en juger par les arches condamnées utilisées dans le temps pour abriter les échoppes des artisans de plein air les jours de marché, et surmontée d’une tour dont je dirais que la verticalité n’est pas la qualité première. Et à l’intérieur, Anne-Marie Simon à la manœuvre, occupée à faire déguster et à vendre le vin de leur propriété, à elle et son mari !
Des vins de pays des Cévennes. Jusque là, pas de surprise. Des assemblages en vrac, des monocépages en bouteilles. Plus étonnant, déjà. Mais quels cépages ? Pas la peine de chercher, vous ne trouverez pas. En blanc, à la rigueur, vous me direz peut-être grenache blanc et chardonnay, ça sera juste. Mais en rouge, on fait le grand écart entre le pinot noir plus familier des côtes chalonnaises et le tannat en provenance directe du Sud-Ouest profond ! En passant, Dieu en soit remercié, par la syrah, reine incontournable du sud, et d’autres améliorateurs dont j’ai oublié la liste.
Et alors, le vin ? Je l’ai fait déguster à l’aveugle à mes deux beaux-frères, testeurs patentés de mes extravagances et modérateurs pleins de sagesse de mes emportements. Très bien faits, m’ont-ils confirmé ; étonnants, mais très convaincants. Belle dégustation et belle progression. Le blanc peut-être un peu technologique, mais avec un soupçon de malo de bouteille, ce jugement doit être réservé. Quand aux millésimes disponibles, jugez par vous même :
- la Syrah, 2007, une étiquette incroyable, dommage que je n’aie pas d’appareil photo
- le Pinot Noir, cuvée La Roque, 2006, un vrai « Mon Chéri »
- le Tannat, « Duende » (je n’ai pas l’explication du nom), 2004 !
Et tout ça dans des bouteilles à moins de cinq euros…
Quand au blanc de grenache, il s’appelle « Huguenot Vineyard » ; rien que pour son étiquette je l’aime, mais il n’y en a plus. Pas de doute, dès que je trouve cinq minutes, je veux rencontrer l’artiste qui élabore ces nectars : en plus, il s’appelle Yves !